Les fondateurs de ce rendez-vous de métier sont morts depuis longtemps, leur mémoire est malgré tout honorée par des gens qui, de plus en plus, ne les ont pas connus. Drôle de parenté intellectuelle qui se régénère (les participants sont âgés de 20 à 80 ans) et perpétue des gestes et atmosphères alors que les inventeurs ne sont plus parmi nous. La soirée //Documents// (diapositives commentées par Marc Combier, Nicolas Balbot et Jacques Thomas; et extraits sonores choisis par Gérard Perrier et Sabine Millecamps) fut vraiment représentative de cette évocation d'une famille éloignée dont on a entendu les frasques, mais qu'on ne connaît au fond que très peu... Et envers laquelle on éprouve une immense tendresse !
Cette année, les membres du comité rédigent des chroniques lursiennes sur chaque intervention, il restera donc un aperçu quasi-complet de la programmation, interprété par chacun comme il se doit.
Mon billet sera succinct, prétexte à survoler les instants qui m'ont été précieux en cette fin d'août :
• Le feuilleton, animé vigoureusement par Jacques Monnier-Raball, croisant les disciplines et les époques avec aisance et à propos. Une traversée lumineuse des arts et de la société qui m'a particulièrement touchée, après notre immersion dans l'Italie de la Renaissance cet été.
• L'énergie d'Alejandro Paul, typographe et directeur artistique des publications de sa fonderie qui mélangent photographies et typographies dans le but de créer des atmosphères d'utilisation très connotées. Ses axes de travail s'inspirent souvent de formes populaires ou issues de la contre-culture (épicerie, mariage, tatouage…) et voguent ensuite vers les magazines de mode : la scripte déclinée sur tous les tons. Une démarche atypique et grand public dans un univers qui privilégie souvent la mise en valeur de détails formels pour amateurs avisés.
• Le chorégraphe Dominique Boivin, venu présenter son duo homme-pelleteuse. Une longue discussion avec la salle, à propos d'histoire de la danse contemporaine, des outils de notation des mouvements et de la transmission/conservation des chorégraphies. “Il faut assister aux spectacles lorsque les chorégraphes sont vivants car les versions ultérieures ne parviennent pas à garder toutes les intentions.”
• David Castrec, archiviste à l'IMEC, venu présenter son traitement des fonds Vox et Excoffon. (J'ai été très émue de voir les documents que nous avions eu entre les mains lors de la rédaction du livre, à présent archivés et classés.) Démonstration précise, suivie d'un débat sur le traitement des archives des typographes et graphistes, en attente la plupart du temps, au grand dam des héritiers qui les ont confiées. Je pense que c'est un sujet d'importance au moment où la recherche (notamment historique) se développe dans les écoles d'art et de design. Il va falloir organiser un réseau des centres de ressources accessibles aux étudiants et aux chercheurs pour faciliter la consultation et la publication.
• L'engagement de François Caspar, venu présenter les actions de l'AFD, syndicat des professions du design. Re-débat animé sur la terminologie de nos métiers. Alors : graphiste ou designer graphique ??! (ou designer de messages ?!)
• Une belle séquence studieuse puis physique sur l'apprentissage de l'écriture (méthode, thérapie, calligraphie). Où l'on s'appuie sur la compréhension du handicap pour revenir à l'étude de la norme.
• L'opéra diariste d'Olivier Nineuil, qui a feuilleté pour nous ses carnets de notes/recherches/croquis qu'il remplit de manière intensive depuis de nombreuses années. Outre la quantité étourdissante de travail et de réflexions, il a partagé sa fantaisie avec générosité.
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Le fil twitter est devenu un troisième niveau d'échange, en parallèle des conférences et des repas. Un autre lieu actif de conversation, en marge. Témoin en temps réel des émotions contradictoires et mémoire a posteriori des moments décisifs. Lien fragile.