#lure2012

Encore une semaine passée sous le soleil de Lurs-en-Provence où l'association fêtait cette année son soixantenaire… étrange anniversaire nommé //Corps neuf//.

Les fondateurs de ce rendez-vous de métier sont morts depuis longtemps, leur mémoire est malgré tout honorée par des gens qui, de plus en plus, ne les ont pas connus. Drôle de parenté intellectuelle qui se régénère (les participants sont âgés de 20 à 80 ans) et perpétue des gestes et atmosphères alors que les inventeurs ne sont plus parmi nous. La soirée //Documents// (diapositives commentées par Marc Combier, Nicolas Balbot et Jacques Thomas; et extraits sonores choisis par Gérard Perrier et Sabine Millecamps) fut vraiment représentative de cette évocation d'une famille éloignée dont on a entendu les frasques, mais qu'on ne connaît au fond que très peu... Et envers laquelle on éprouve une immense tendresse !

Cette année, les membres du comité rédigent des chroniques lursiennes sur chaque intervention, il restera donc un aperçu quasi-complet de la programmation, interprété par chacun comme il se doit.
Mon billet sera succinct, prétexte à survoler les instants qui m'ont été précieux en cette fin d'août :
• Le feuilleton, animé vigoureusement par Jacques Monnier-Raball, croisant les disciplines et les époques avec aisance et à propos. Une traversée lumineuse des arts et de la société qui m'a particulièrement touchée, après notre immersion dans l'Italie de la Renaissance cet été.
• L'énergie d'Alejandro Paul, typographe et directeur artistique des publications de sa fonderie qui mélangent photographies et typographies dans le but de créer des atmosphères d'utilisation très connotées. Ses axes de travail s'inspirent souvent de formes populaires ou issues de la contre-culture (épicerie, mariage, tatouage…) et voguent ensuite vers les magazines de mode : la scripte déclinée sur tous les tons. Une démarche atypique et grand public dans un univers qui privilégie souvent la mise en valeur de détails formels pour amateurs avisés.
• Le chorégraphe Dominique Boivin, venu présenter son duo homme-pelleteuse. Une longue discussion avec la salle, à propos d'histoire de la danse contemporaine, des outils de notation des mouvements et de la transmission/conservation des chorégraphies. “Il faut assister aux spectacles lorsque les chorégraphes sont vivants car les versions ultérieures ne parviennent pas à garder toutes les intentions.”
• David Castrec, archiviste à l'IMEC, venu présenter son traitement des fonds Vox et Excoffon. (J'ai été très émue de voir les documents que nous avions eu entre les mains lors de la rédaction du livre, à présent archivés et classés.) Démonstration précise, suivie d'un débat sur le traitement des archives des typographes et graphistes, en attente la plupart du temps, au grand dam des héritiers qui les ont confiées. Je pense que c'est un sujet d'importance au moment où la recherche (notamment historique) se développe dans les écoles d'art et de design. Il va falloir organiser un réseau des centres de ressources accessibles aux étudiants et aux chercheurs pour faciliter la consultation et la publication.
• L'engagement de François Caspar, venu présenter les actions de l'AFD, syndicat des professions du design. Re-débat animé sur la terminologie de nos métiers. Alors : graphiste ou designer graphique ??! (ou designer de messages ?!)
• Une belle séquence studieuse puis physique sur l'apprentissage de l'écriture (méthode, thérapie, calligraphie). Où l'on s'appuie sur la compréhension du handicap pour revenir à l'étude de la norme.
• L'opéra diariste d'Olivier Nineuil, qui a feuilleté pour nous ses carnets de notes/recherches/croquis qu'il remplit de manière intensive depuis de nombreuses années. Outre la quantité étourdissante de travail et de réflexions, il a partagé sa fantaisie avec générosité.

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Le fil twitter est devenu un troisième niveau d'échange, en parallèle des conférences et des repas. Un autre lieu actif de conversation, en marge. Témoin en temps réel des émotions contradictoires et mémoire a posteriori des moments décisifs. Lien fragile.

Métiers du graphisme

Jean-Pierre Durand est sociologue, spécialiste de la question du travail et des organisations; Joyce Sebag est également sociologue, orientée vers l'univers du cinéma. Tous deux signent une étude sur les métiers du graphisme, dans son acception la plus large : graphistes du secteur institutionnel, graphistes du secteur commercial (publicité et communication), graphistes du secteur vidéo (cinéma d'animation et 3D).
Partant du constat paradoxal que le graphisme façonne notre environnement visuel de façon permanente tout en étant un corps de métier totalement transparent aux yeux du public, ils observent ce petit monde pour tenter de comprendre ce qui lie ou différencie tous ces profils. Ces métiers ne sont pas connus ni reconnus, autant du grand public (terme toujours trop flou) que des commanditaires qui n'en reconnaissent pas l'importance, l'apport ni l'autorité.

Un livre très important, paru il y a peu de temps et qui témoigne de ce que nous ressentons au quotidien de nos conditions de travail. Un miroir cruel, assez fidèle, d'une lecture relativement déprimante, qui se conclut sur une note positive -ouf- par la recommandation de la création d'un lieu dédié au graphisme (équivalent du Lieu du design à Bastille, par exemple). Un lieu de ressource et de diffusion qui fédèrerait cette communauté éparse et la rendrait visible et compréhensible. Un lieu pour souffler et reprendre des forces quand lors d'une énième réunion on apprend que le dessin du logo d'un événement territorial va être issu d'un concours auprès de la population ("pour impliquer les habitants") et que tous les outils de communication du même événement sont conçus par la secrétaire de mairie qui a suivi une formation sur In-design. (Il est nécessaire d'assister à ce genre d'entrevue pour que les gens rencontrent de vrais graphistes et réalisent que c'est un métier, mais quelle épreuve que ce militantisme !!)

Jean-Pierre Durand et Joyce Sebag, Métiers du graphisme, La documentation française, coll. Questions de culture, Paris, 2011. Ministère de la Culture et de la Communication - Département  des études, de la prospective et des statistiques.

Rendez-vous de Lure #2 : Voix politiques / C'est demain !!

Se faufilant dans l'exposition de Pierre di Sciullo/En esthète de gondole, les Rencontres de Lure proposent une soirée dédiée aux opinions graphiques. Quelques mois avant les élections présidentielles, quels langages visuels utiliser pour se faire entendre ?

Une rencontre tonique avec le dessinateur Willem, observateur acide de la scène politique et de nos contemporains...
... et le graphiste/typographe Sébastien Marchal, producteur d'images au sein de collectifs militants grâce à des alphabets sur mesure.

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Le mardi 21 février à 19h00
Galerie Anatome, 38 rue Sedaine, 75011 Paris
Entrée libre dans la limite des places disponibles

Rdv Lure : Pièces uniques

Je reprends avec Brigitte Suffert l'organisation des Rendez-vous de Lure à Paris. Nous avons prévu quatre dates sur la saison 2011–2012, articulées en ping-pong avec la programmation de la Galerie Anatome. Un prétexte pour aborder divers sujets : définir le design graphique en regard d'autres disciplines de création, écritures politiques, formes éditoriales, enseignements.
C'est l'automne, c'est parti !

En parallèle à l'exposition Trafik/Wat, les Rencontres de Lure avec l'association Galerie Anatome proposent une soirée autour de la notion de pièce unique dans le design graphique.
Éloignées de la production et de la diffusion industrielles, des initiatives d'installations uniques à dimension artistique voient de plus en plus le jour. Deux questionnements : Pourquoi les designers investissent-ils ce type de commandes ? En quoi le cheminement créatif du design peut-il nourrir le propos artistique ?

Une rencontre avec le collectif Trafik et des invités surprises...!

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le mardi 29 novembre à 19h00
Galerie Anatome, 38 rue Sedaine, 75011 Paris
entrée libre

Retour de Lure


Quelques souvenirs – en vrac – de la session 2011 des Rencontres de Lure : À la marge.
Tout d'abord, une audience importante et attentive : toujours ces générations qui se côtoient et beaucoup de nouvelles têtes. Au fur et à mesure de mes venues, je saisis mieux l'histoire de cette association et commence même à en faire partie... Cette fidélité intellectuelle qui s'inscrit dans le temps est précieuse, d'autant plus qu'à contre-courant du rythme trépidant de nos métiers et sociétés.

Parmi le flot des intervenants, quelques uns qui m'ont particulièrement interpellée :
# Sam Winston, soucieux des formes narratives et triturant la matérialité du texte imprimé, au long d'une présentation éclairée par un discours précis et conscient sur sa pratique
# Eve Netchine, son évocation érudite et savoureuse du peuple des marges de codex manuscrits (entre gloses surgissant du mot et nonnes cueillant le fruit défendu)
# Philippe Millot, à travers un méticuleux voyage parmi des citations et des ouvrages mettant précisément en scène ces citations ; le tout scandé par un phrasé lent et suspendu (j'ai été très émue par le soin apporté à sa présentation)
# François Weil, par la légèreté feinte et la complémentarité image/commentaire
# Annick Lantenois, pour la précision et la lenteur de la diction qui laisse l'esprit de chacun s'approprier les termes choisis (sans image)
# Laurent Vannini, pour le tourbillon historique (l'évocation de la contre-culture américaine des années 60/70 et son influence décisive sur Internet) et la revendication politique
# Tom Henni, et son approche pédagogique du livre : comment l'exposer et expliquer les choix présidant à sa forme ?..

Les termes et thèmes abordés se sont croisés au long de la semaine, plus ou moins fréquemment. Nous avons entendu, discouru et commenté : Imaginaire contemporain, Impermanence, Attraction/inversion/indifférence, Glose, Voir/savoir/avoir, Tag, Valentinage, Imagerie populaire, Nouveaux communalistes, Économie de l'attention...
/ L'importance des mots pour penser le design graphique, le définir et l'installer. Cette discipline peine décidément à s'imposer dans l'imaginaire collectif.

La session s'est conclue sur la question des archives éparpillées de l'association, leur stockage pérenne et la diffusion de leur contenu; mais aussi sur la nécessité de l'apprentissage du langage de programmation par les graphistes afin d'accéder à une autonomie vis à vis des éditeurs de logiciels dominant. Des chantiers ambitieux et vastes, un avenir excitant incluant un réel positionnement politique.
L'année sera intense.



Rdv Lure : Les Graphiquants




Auteurs d'affiches énigmatiques ou de scénographies raffinées, les Graphiquants sont les invités de ce dernier Rendez-vous de Lure parisien.
Associés depuis 2008, ils développent leurs activités sur plusieurs fronts : recherches plastiques donnant lieu à des auto-éditions quasiment dépourvues de texte, commandes privées et publiques variées.
Ils présenteront notamment leur synthèses de données pour le Familistère de Guise, les adaptations abstraites qui en ont dérivé dans le rapport d'activité 2010 du Cnap et quelques projets récents.

+ une invitée surprise !

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le mardi 28 juin à 19h30
Galerie Anatome, 38 rue Sedaine, 75011 Paris
entrée libre

Rdv Lure : Séverin Millet


En écho à l'exposition du travail dessiné de Jan Bons, les Rencontres de Lure invitent Séverin Millet, auteur/illustrateur pour la presse et l'édition pour enfants, à présenter son univers plastique riche et protéiforme. À travers l'exploration des techniques d'impressions et des supports multiples (livre, magazine, affiche, sculpture, peinture, sérigraphie...), il navigue au sein d'une population et d'un bestiaire toujours renouvelés. Il évoquera son travail au long cours, son blog, ses carnets de croquis...

Après des études aux Arts décoratifs de Strasbourg, il commence comme dessinateur de presse pour le journal Le Monde, avec qui il travaille régulièrement, suivront le journal Libération et les magazines Télérama, XXI, Internazionale... En 2005 son premier livre "Drôles de Zèbres" est publié, il sera le début de nombreux albums. (Oû, Mêli-mélons, Elmouth, Images Filantes, Les rêves de Milo...) aux éditions du Seuil, Actes sud, Albin Michel, Memo... Né en 1977, il vit et travaille actuellement à Lyon.

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le mardi 8 mars à 19h
Galerie Anatome, 38 rue Sedaine, 75011 Paris
entrée libre